Récolte de Pâques

Nous sommes de bons dénicheurs d'immondices culinaires mais de piètres chasseurs d’œufs de Pâques. Il nous a fallu une semaine pour retrouver tous ces coquins de chocolat aux formes, tailles et couleurs aussi variées qu'alléchantes. L'année prochaine on pensera à vérifier sous le café moulu et dans le réservoir de la chasse d'eau. Alors que nous examinions notre récolte promettant une chouette crise de foie, ou une intoxication aiguë au papier d'alu tant il est parfois difficile de le retirer, certains œufs ont attiré notre attention.

œufs vaut tard que jamais

Œufs vaut tard que jamais

Si la coquille est singulière, avec des taches noires et un grain crayeux, ce n'est rien comparé à l'intérieur. En lieu et place du chocolat, praliné ou alcool que toute personne s'attendrait à trouver, voire de vrais œufs blanc et jaune pour les traditionalistes, on découvre avec stupeur et une pointe d’effroi des couleurs insolites vert et noir maladif. On a comme un doute sur la fraîcheur. Ces œufs n'ont pas gagné à nous attendre ou alors on a affaire à la ponte d'un improbable volatile ou d'un xénomorphe en goguette.

Avec un cœur aussi noir, les géniteurs devaient être maléfiques.

Avec un cœur aussi noir, les géniteurs devaient être maléfiques.

Même en faisant abstraction des couleurs, on peut difficilement les qualifier d’œufs durs tant ils semblent avoir affreusement muté. Le "blanc" n'est plus qu'une masse ambrée gélatineuse et vitreuse, rappelant la gélatine des pâtés ou terrines.  Le "jaune" n'est pas en reste dans la bizarrerie et enchaîne les anneaux de couleurs et de natures différentes. Du plus périphérique au plus intérieur, leur apparence passe du solide au pâteux, en passant par du granuleux, tout en occupant toute la palette du dégradé gris-verdâtre vers noir.

Un panaché de textures et de couleurs.

Un panaché de textures et de couleurs.

Si ce n'était de la nourriture, on pourrait presque trouver cette composition harmonieuse. Quoiqu'à y regarder de plus près, d'un des œufs suinte un liquide putride comme le premier fromage venu. Cette coulure impropre digne du pire des films de série Z est peu engageante. Ce spectacle d’œufs corrompus se répandant n'est peut-être pas sans rapport avec l'ancien cimetière indien sur lequel nous sommes. Ça expliquerait aussi le sang sortant de l'ascenseur.

Alien 5

Alien ou Poultrygeist ?

N'importe quelle personne jetterait ces immondices, et les plus prudents iraient même jusqu'à les brûler. Malheureusement pour eux, les aveugles ne seront pas avertis car l'odeur est moins alarmante que le visuel. Ces œufs sentent ... les œufs durs, en légèrement plus marqué et tirant un peu sur le soufre. Rien de foncièrement incommodant.

A vos pailles !

A vos pailles, prêts, partez !

Si l'odeur semble presque normale, une fois en bouche c'est une toute autre affaire. On a affaire à un panaché de textures et de saveurs différentes, un mélange étrange entre l'élasticité et la relative solidité de la partie gélatineuse et le cœur fondant et crémeux.

La gangue brune passe assez bien, en petite quantité, le goût d’œuf soufré n'est pas très prononcé et, en fait, seule la texture gélatineuse est réellement dérangeante. Gustativement parlant l’intérêt est limité.

De quoi colorer une piémontaise

De quoi colorer une piémontaise ...

Le cœur au contraire laisse moins de marbre. Indubitablement un jaune d’œuf, mais tout en en étant très éloigné. Un jaune plus gommeux et qui laisserait un désagréable arrière goût acre en bouche. Son centre renferme en plus une pâte crémeuse au goût de crème hydratante à l’œuf pourri et au soufre. Cette boue interne astringente imprègne aussi bien les muqueuses, sûrement pour que l'on ne l'oublie pas de sitôt.

... ou faire des cauchemars.

... ou faire des cauchemars.

Au final ces œufs sont loin d'être vomitifs mais entre leur brun oubliable, leur noir soufré et leur crème hydratante interne, ils ne sont pas très attirants non plus. L'année prochaine on mettra les bouchées doubles pour retrouver nos friandises de Pâques à temps et leur éviter cette fin tragique.

 

Verdict :

Giraf

 ★★☆☆☆ 

L'idée même de manger ces étranges œufs est pire que la dégustation elle même. La texture est assez dérangeante mais le goût presque acceptable et comme les Kinder Surprise le plus intéressant mais le moins mangeable est au milieu. En fait leur plus gros inconvénient est d'avoir un goût d’œufs durs et ça ne plaide pas en leur faveur. Le côté insolite et coloré ne les sauvera pas du jambon de bronze.

Kephy

 ★★☆☆☆ 

Bien connus et appréciés de certains, ces œufs ont leur place dans le musée des horreurs culinaires. Si leur odeur est à peine plus désagréable que celle des œufs "normaux", c'est, comme le huitlacoche, visuellement qu'ils font leur petit effet. Si on fait abstraction du fait que ça se mange, on pourrait presque les trouver jolis, manière pierres "précieuses" vendues dans les magasins de souvenirs. De là à les mettre dans sa bouche... Finalement, si les textures ne sont pas des plus agréables, entre le gélatineux solide du "blanc" et le granuleux /coulant / crémeux du "jaune", ces œufs se mangent tout de même, non sans quelques réactions de dégoûts incontrôlables. Ils évitent donc la note sanction et s'en tirent avec un jambon de bronze. On pourra dire qu'on l'a fait, mais on ne le refera pas.

 

PS : Trouvable chez Paris Store, notamment Paris XIIIième et Vénissieux, 5€50 la boite de 6 œufs.

PS² : Pour les curieux, il s'agit en fait d’œufs de cent ans, une spécialité culinaire chinoise. Pour obtenir cet étrange met, des œufs de cane sont conservés quelques semaines ou mois sous une mélange de chaux, cendre, riz, sel et feuilles de thé. Dans cet environnement au ph basique, le blanc et le jaune subissent une spectaculaire transformation au niveau couleur et texture. Étrangement on trouve beaucoup d’œufs de 100 ans venant de Hongrie, on en déduit logiquement que ce pays a été annexé en secret par la Chine.

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Pour un article lu, trois offerts :

3 réponses à “Récolte de Pâques”

  • Même si je connais pas mal de personnes qui mangent régulièrement ces oeufs de cent ans, je ne me laisserais jamais tenter… Rien que d’y penser…BEUUUUUUUUUUUU!

  • jubiii:

    j’avais entendu dire sur marmiton que c’était pas si horrible 😀

    • En soit le goût est acceptable : un œuf dur en un peu plus corsé / soufré, mais Kephy et moi-même ne sommes à la base pas des grands fans des œufs cuits dur.
      Ça se tenterait presque avec de la mayo pour voir tient.

      Après la force varie un peu, le coulant avait plus de goût (et ça imprégnait bien la bouche) que le « sec », et nous en avons déjà mangé par le passé des plus corsés.

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