La mort noire

En allant en Islande, je m'attendais à ce que les habitants, en bon descendants de vikings, ne tournent pas qu'au lait de chèvre et apprécient des boissons plus vigoureuses qui réchauffent le corps et l'esprit. Mais une fois sur place, j'ai pu constater que leurs rapports avec les spiritueux était bien différent.

Ég tala ekki íslensku

L'alcool est assez rare et très cher avec en plus une législation agressive. Hormis les bars et restaurants, l'alcool n'est vendu que dans des magasins spécialisés, les Vínbúð, qui doivent se conformer à des horaires très stricts et fermer les week-ends. L'alcool, surtout avec de hauts degrés, est fortement taxé, ce qui se ressent sur le prix de vente. Une bouteille de leur alcool local, le brennivín, y coûte dans les 40€, dont 32€ de taxe plus 3€ qui reviennent au vínbúð et 1€ de consigne, ne laissant que 4€ pour le producteur. Heureusement pour nous, le duty free de l'aéroport de Keflavík ne vend pas que du poisson et des têtes de mouton congelées et m'a permis de ne pas rentrer bredouille tout en sauvant mon porte-monnaie.

Attention traversée de Viking bourré

En fait j'avais à moitié tort, l'alcool ne coule peut-être plus à flot dans ces contrées hostiles, mais ce ne fut pas toujours le cas, loin de là. L'alcoolisme devenait un tel problème au début du XXième siècle que le gouvernement appliqua la prohibition en 1915. L'Histoire ne dit par contre pas si un Al Capone en pull islandais sévissait dans la région. En 1935, elle fut partiellement levée, les liqueurs et autres alcools vigoureux furent ré-autorisés mais pas les bières "fortes" dans lesquels le gouvernement voyait une passerelle vers les boissons plus fortes et la dépendance à l'alcool. Enfin fortes, ... Je ne sais pas qui a donné ce qualificatif mais il devait tituber rien qu'à voir une bouteille pour définir la limite à 2,25%. L'interdiction dura très longtemps et ne fut levée qu'en 1989, le 1er mars, fêté chaque année comme jour de la bière.

Pourquoi tant de haine

Le brennivín est une eau-de-vie typique islandais produite par distillation de pommes de terre et parfumée au carvi, une plante aromatique qui a déjà croisé notre route et qui m'avait pas mal marqué à l'époque (rassurez-vous j'ai retrouvé l'usage de ma langue depuis). Il titre à 37,5% et est totalement incolore. Son nom veut dire "vin brûlé" et les islandais le surnomment svarti dauði, mort noire. Si vous allez en Islande, on vous en proposera souvent après du hákarl  histoire de faire passer son horrible goût, voire oublier ce mauvais moment selon la quantité ingérée. Notre mort noire personnelle, la plus connue, est produite par la brasserie Egill Skallagrímsson. L'étiquette est toute simple, une carte du pays et le nom en blanc sur fond noir. En 1935 le noir fut choisi pour être inattractif, mais en fait a eu en fait l'effet inverse. C'est vrai que ça lui donne un certain charme.

Langicide version 2 ?

Comme on s'en doutait l'odeur nous est familière, elle ressemble fortement à celle du Gilka, mais en légèrement plus parfumé. Le goût rappelle lui aussi l'alcool au pingouin mais il y a quand même de grandes différences. On sent beaucoup moins l'alcool même si ça réchauffe par où ça passe, et surtout on a beaucoup moins l'impression de boire de l'Hextril. On le prendrait pour du kummel coupé à la vodka, on retrouve bien le goût du carvi mais en plutôt doux. Il passe donc vraiment bien, à mille lieues de son cousin allemand. Par contre je n'ai pas pu tester son action et le réconfort qu'il apporte après du requin faisandée, j'en garde bien un bout depuis plus de six mois dans une boite hermétique mais uniquement à des fins d'arme chimique.

 

Verdict :

Giraf

 ★★½☆☆ 

Contrairement au Gilka, le brennivín est simplement parfumé au carvi, et ça fait toute la différence. Cette vodka au carvi a un goût bien plus doux et agréable. Malgré tout je ne consommerais pas plus d'un fond de verre de cet alcool tant l’arôme reste en bouche. Je lui mettrais bien un jambon de plus que le Gilka mais un jambon d'argent me paraît une note excessive, et donc ça sera un demi jambon d'argent.

Kephy

 ★★☆☆☆ 

Comme son grand frère, ce breuvage a une odeur d'alcool modifié désinfectant, mais en moins agréable. Côté goût, c'est pas folichon, ça sent le vieux et le renfermé, avec un petit goût d'herbe. Je ne fais pas bien la différence avec le Gilka, et mets donc la même note pour ne pas faire de jaloux.

PS : Trouvable hors de prix dans les vínbúð, et vraiment abordable au duty free de l’aéroport, 1359 ISK la bouteille de 1L soit environ 8€50.

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