Régénération indienne à la javel

Premier article d'une série consacrée à l'Inde où j'ai passé deux semaines, sûrement en alternance avec d'autres sujets pour ne pas trop lasser. L'Inde est d'une richesse culinaire incroyable mais je n'ai rapporté dans mes valises que deux produits à partager avec Kephy. Manque de pot pour nous, ce n'est pas les chips Lay's Magic Masala, mais des produits achetés dans un temple hindou. Des amlas confits, qui paraissaient bons et sucrés, et une boisson aux plantes, suffisamment verte et gluante pour être bien mauvaise. Un choix totalement au visuel, sans se poser la moindre seconde la question de leur présence en ces lieux.

Amla 3 Special Edition

Amla 3 Special Edition

 

L'amla, ou groseille indienne (आमलक en hindi), est le fruit de l'arbre du même nom (Phyllanthus emblica) qui pousse en Inde, au Sri Lanka ou encore au Nepal. Cette baie de couleur verte mesure environ 1cm et contient un noyau. Elle est consommée sous différentes formes : crue, pickles, confite avec du sucre, confiture ou encore ingrédient de certains dals (plats indiens à base de lentilles). Sa chair est acide, amère, astringente et légèrement fibreuse, sa peau comestible et c'est une source importante de vitamine C, 30 fois plus que l'orange, et d’antioxydants. Elle sert aussi en cosmétique, principalement pour des produits capillaires et des soins de peau mais surtout, c'est une composante importante de la médecine traditionnelle.

Phyllanthus emblica (1)

Phyllanthus emblica (1)

 

La médecine traditionnelle indienne, l'ayurveda, est intimement liée à la spiritualité hindoue, ce qui explique la présence de produits comme l'amla confit dans la boutique d'un temple comme celui d'Akshardham (magnifique au demeurant) à New Delhi. L'ayurveda, qui signifie science de la vie, mixe réalisation de soi et santé physique. Elle est associée à Dhanvantari, le 12ième avatar de Vishnou selon le Bhagavata Purana (un des textes sacrés de l'hindouisme).

Temple d'Akshardham, New Delhi (2)

Temple d'Akshardham, New Delhi (2)

 

L'ayurveda considère le corps comme composé de :

  • cinq mahabhutas (éléments) :
    • Prithivi : terre

      Dhanvantari (3)

      Dhanvantari (3)

    • Tejas : feu
    • Ap : eau
    • vayu : air
    • akaska : espace
  • trois doshas (énergies de base du vivant) :
    • Vāta : énergie cinétique,
    • Pitta : énergie de transformation,
    • Kapha : énergie de cohésion,
  • sept dhatus (tissus)
    • Asthi : os, cartilage, ongles, poils, cheveux,
    • Mamsa : muscles,
    • Majja : moelle osseuse et tissus nerveux,
    • Meda : tissus adipeux,
    • Rasa : plasma,
    • Rakta : tissu sanguin,
    • Shukra : tissus reproducteurs,
  • seize shrotas (canaux qui véhiculent les doshas).

 

Dans cette médecine traditionnelle, l'amla a le statut de Rasayana, tonique rajeunissant. Il nourrit et régénère tous les tissus, a des effets revitalisants, anti-age, il augmente la vitalité, et améliore la résistance à certaines maladies. Il est très utilisé en soin de peau pour ses vertus toniques et contre le vieillissement cutané et de cheveux. Il apaise les personnes de constitution Vata/Pitta et est aussi bon pour les yeux, l'estomac et le cerveau.

 

Régénération à la javel

Régénération à la javel

 

En somme ce petit fruit est un allié santé parfait. Mais qu'en est-il de son goût car après tout, c'est ce qui nous intéresse le plus. L'amla confit testé se présente sous forme de petits morceaux séchés et durs assez peu odorant. En plus de leur propriété régénérante, ils sont sûrement très bons pour les muscles de la mâchoire, tant ils les font travailler. On est loin des carrés souples de papayes ou des ananas confis des mélanges apéro. Ici, les morceaux sont durs et peu sucrés. Rien de prohibitif cependant, surtout que le goût commence sur de fortes notes de figues, auxquelles ils empruntent d'ailleurs la texture granuleuse. Ces fruits mériteraient une bonne note, si seulement ils s’arrêtaient là ... Mais après nous avoir appâté et mis en bouche, la saveur fait un virage à 180°. La douceur devient amertume, et s'accompagne d'une sensation astringente, de notes salées et terreuses, mais surtout, d'un fort goût de javel qui remonte dans le nez et reste bien en bouche. Plus qu'une dégustation, on se croirait à la piscine. Une fois la javel détectée, c'est fini, on ne sent plus que ça, on n'a alors plus aucune envie de manger ces friandises et on est tenté de recracher le morceaux que l'on mange.

 

 

Verdict :

Giraf

 ★½☆☆☆ 

Ces amlas séchés seraient bons sans cet horrible goût de javel. On se demande presque s'ils n'ont pas essayé de les nettoyer avec, tant la ressemblance est flagrante. C'est peut-être ça le secret médical, la régénération par la javel, un moyen radical de se purifier l'estomac. J'aurais dû savoir à quoi m'attendre en achetant des produits médicinaux dans un temple ... Peut-être qu'ils ne me conviennent pas car je ne dois pas être de composition Vata/Pitta, mais en tout cas ces amlas confits ne méritent pas plus d'un demi jambon de bronze.

Kephy

 ★☆☆☆☆ 

Ce nouveau contact avec l'ayurveda n'a pas été des plus agréables, puisque j'ai pour ma part immédiatement été submergé par ce goût de javel prédominant, qui empêche d'apprécier l'éventuel véritable goût de l'amla, et persiste d'ailleurs longtemps après avoir avalé. L'aspect inoffensif de ces fruits ne leur suffira pas à obtenir mieux qu'un jambon de porc.

 

PS : Trouvé au temple d'Akshardham, à New Delhi, 75 roupies (environ 1€) le paquet de 250g.

1. Photo par me, myelf and I sous licence Creative Commons CC BY-SA 3.0.

2. Photo par Swaminarayan Sanstha sous licence Creative Commons CC BY-SA 3.0.

3. Image par F16 et LaLa in Udipur sous licence Creative Commons CC BY-SA 3.0.

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