Shankhpushpi, oh oui !

Pour vous faire patienter avant la troisième et dernière partie de notre petit panorama de l'Inde (premières parties ici et ) tout en restant le thème, nous avons testé une étrange boisson aux herbes rapportée du même temple hindou que les amla confits au bon goût de javel. Devant tous les étranges breuvages, poudres et objets spirituels de la boutique, mon choix s'est naturellement porté sur l'article le plus repoussante possible, car comme dit le vieux proverbe eatnwafien, plus ça à l'air dégueux mieux c'est. Et me voici donc reparti avec 125 roupies en moins (un peu plus de 1€60), et une grosse bouteille tordue de 700mL d'une sorte de boue épaisse verdâtre entre militaire et marécage nommée Brahmi & Shankhpushpi Sharbat. Avouez que même en n'étant pas marqué en Hindi, cela ne nous avance pas du tout.

Eau du Gange en bouteille

Eau du Gange en bouteille

 

 

Globalement avec l'image et le reste de l'étiquette on comprend qu'il s'agit d'une préparation base de plantes à diluer dans de l'eau pour obtenir une boisson rafraichissante. Ce qui est précisément la définition d'un sharbat. Une sorte de sirop donc, ce qui explique la viscosité. Par contre les plantes en question, le shankhpushpi et le brahmi, sont inconnus au bataillon et nous oblige à quelques recherches. Le shankhpushpi, de son vrai nom convolvulus pluricaulis, est une petite plante du nord de l'Inde, qui pousse dans les zones rocheuses ou sableuses. Ses fleurs varient du blanc au violet bleu, et comme je ne trouve pas de photo, je vous colle convolvulus tricolor, de la même famille, l'air de rien. Elle contient un tas de molécules actives, des hétérosides, des flavonoïdes, des alcaloïdes et des coumarines. Ce cocktail en fait une plante très appréciée de l'ayurvéda, pour ses effets sur le système nerveux central : boost de la mémoire, de l'intellect et réduction du stress. Nous ne nous attarderons pas sur la médecine traditionnelle indienne, l'ayant déjà abordé précédemment dans l'article des amla confits (ici).

shankh4

Convolvulus tricolor (1)

 

Le brahmi, ou Bacopa monnieri, quant à lui, est une plante grasse des zones marécageuses, poussant un peu partout à travers le monde, en Inde, en Australie, dans certains pays d'Amérique du Sud et même en Europe. Ses feuilles font moins de un centimètre, de même que ses petites fleurs blanches, et il peut former de véritable tapis de plusieurs dizaines de mètres au bord de étangs. Comme le shankhpushpi, il contient nombre de principes actifs, alcaloïdes, triterpènes, saponines et autres noms barbares, ainsi que de la nicotine. Il est bien sûr reconnu en ayurvéda, ce n'est pas pour rien qu'elle porte un nom qui vient de Brahmā le créateur, dieu majeur de la trinité Hindoue, et agit elle aussi sur la mémoire et la vitalité mentale.

Bacopa monnieri (2)

Bacopa monnieri (2)

 

Outres ces deux plantes, dans des proportions inconnues, ce sirop contient de l'eau, du sucre, de l'acide citrique ainsi que des conservateurs, arômes et colorants, sans plus de précision. Il se présente sous la forme d'un gel très épais, plus prés de la mélasse que du sirop Teisseire. L'odeur sucrée de plantes est contre toute attente loin d'être désagréable, entre le menthol, les plantes médicinales, le Vicks, l'Hextril et les herbes aromatiques, et fait très naturelle.

Ici déjà touillé plusieurs fois

Ici déjà touillé plusieurs fois

 

Une bonne surprise, par contre c'est une vraie petite horreur à mélanger. Ce sirop lourd et chargé n'aime pas l'eau et reste bêtement au fond. Après de vigoureux coups de touillettes, on obtient une boisson verdâtre tout à fait fluide, avec malgré tout d'apparents filaments plus épais par transparence. L'étiquette recommande de diluer dans quatre volumes d'eau mais sept ou huit semblent plus adaptés tant ce sirop est concentré et sucré.

Se mettre au vert

Se mettre au vert

 

Le goût est tel que l'odeur nous l’annonçait, assez sucré (en ayant en plus dilué plus que prévu) et très plantes, avec là encore de la menthe avec même la sensation menthol rafraichissant en fin, d'autres plantes indéfinies, et une pointe réglisse en fin voire même de thym. Le sucre rend le tout ni herbeux ni amer, ce qui en fait une boisson tout à fait respectable et rafraichissante. Comme quoi, l'habit ne fait pas le Brahmane (caste de clercs et prêtes hindous).

 

Verdict :

Giraf

 ★★★☆☆ 

Frais, un bon gout mentholé, désaltérant bien qu'un peu trop sucré, et un rajeunissement du cerveau en prime. 125 roupies bien investies donc, qui méritent un jambon d'argent.

Kephy

 ★★★☆☆ 

Si on fait abstraction de la bouteille à l'aspect douteux, et au contenu qui ne l'est pas moins, cette boisson est plutôt une bonne surprise. A l'odeur, on retrouve le pan masala, ce mélange de graines et de sucre souvent apporté avec l'addition pour rafraîchir l'haleine et aider à digérer. Le goût, sucré et légèrement herbeux, est agréable, sans pour autant pousser à se servir un deuxième verre dans la foulée. Ce contraste entre l'aspect et le goût mérite bien un jambon d'argent.

 

PS : Trouvé au temple d'Akshardham, à New Delhi, 125 roupies (environ 1€60) la bouteille de 700ml.

1. Photo par Isidre blanc sous licence Creative Commons CC BY-SA 4.0.

2. Photo par Forest & Kim Starr sous licence Creative Commons CC BY-SA 3.0.

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