Butch au pays des kangourous

Vous vous demandez sûrement la raison du récent article sur l'échelle de Scoville, qui n'était ni un test, ni même marrant (on a tous ses moments de faiblesse). Il est paru non sans arrières pensées, car à l'honneur aujourd'hui le deuxième piment le plus fort au monde : le Trinidad Scorpion Butch T (1 463 700 SHU), avec la sauce Scorpion Strike de l'australien Chilli Factory qui titre environ 800 000 SHU.

Si vous vous attendiez à ce que l'on parle du plus fort, rassurez vous, le test du Trinidad Scorpion Moruga (2 009 231 SHU) est déjà dans les tuyaux ; pour compenser un peu, un petit bonus en fin.

G'day Bruce !

Chilli Factory est une petite société australienne assez peu connue, mais qui a des arguments de poids : elle a fait pousser le piment qui a servi à l'homologation du record du Butch T et est quasiment la seule sur le marché à proposer une sauce utilisant ce piment. La Scorpion Strike est la sauce la plus forte de leur gamme, 15/10 en force d'après leurs critères australiens, et est qualifié de sauce BBQ stupidement forte. Ne vous méprenez pas, ce n'est pas du tout une sauce barbecue au sens français du terme (la sauce brune sucrée et fumée), on a bien affaire à une vraie sauce piquante composée de 58% de Butch T, de vinaigre, de sauce worcestershire et de sauce soja.

Rules at the University of Woolamaloo

Malgré un choix de couleur plutôt douteux, l'étiquette est joliment décorée avec un scorpion style cartoon à l'air vicieux, le logo de la compagnie avec des piments à la place des "i" et un nom qui en jette. Le reste de la gamme de Chilli Factory est tout aussi sympathique, associant toujours une sauce à un animal australien : Devil's Delirium avec un diable de Tasmanie, Turbo Supercharge avec une autruche, Morning Afterburn avec un koala ou encore Kangaroo Punch avec ... devinez quoi (indice : ça commence par un K).

 
Cette sauce d'un rouge assez classique pour du piment a un fumet qui allie ceux de deux types de sauces radicalement différentes : les purées de piment, avec une agréable odeur de piment frais et un piquant aigu d'un côté, et les sauces concentrées aux extraits de piments qui attaquent le nez façon Tchernobyl rien qu'en les respirant de l'autre. Elle est d'une consistance un peu pâteuse mais reste tout de même assez liquide, et est parsemée de pépins de piment.

Rule 6: there is no rule six

Comme d'habitude, la dégustation se fait à la petite cuillère, la quantité idéale pour se rendre compte de la force (et pour potentiellement passer une mauvaise nuit). La sensation n'est pas crescendo, elle atteint directement sa force maximale à peine cinq secondes après que la cuillère ait déversé son contenu dans la bouche. Une grosse explosion de chaleur abrupte. Elle prend d'abord sur l'arrière de la bouche puis diffuse dans les joues et la langue qui brûle intensément. Très vite, les glandes salivaires s'activent. L'effet se cantonne cependant à la bouche, et hormis un fulgurant hoquet de quatre-cinq contractions, je n'ai pas eu de manifestation physiques comme sueur, nez qui coule, d'oreilles qui chauffent ou cliquetis d'oreille.

L'effet est violent mais ne dure pas très longtemps. Pendant deux minutes l’action est maximale sur les joues, langue et gorge. Passé ce délai, la brûlure ne se localise déjà presque plus que sur la langue et en cinq minutes le gros est retombé. Cette sauce est très forte mais supportable, il faut dire que j'ai un bon entraînement.

Notez quand même que j'ai eu l'estomac légèrement en vrac pendant dix minutes, mais compensé par une grosse dose d'endorphine qui donne presque l'impression de planer. Gustativement cette sauce est une belle réussite, elle commence par un goût de piment frais et enchaîne vite avec un goût plus lourd et légèrement fumé qui imprègne bien la bouche. Cette scorpion strike est parfumée et agréable, et se marie très bien avec tous types de nourriture : poêlée de légume, saucisses, pizzas, sandwich, ...

 

Verdict :

Giraf

 ★★★★½ 

Ce n'est pas la seule sauce pimentée chez moi, mais le niveau dans la bouteille baisse vite, un signe qui ne trompe pas. Elle a un bon équilibre entre force et goût. Je lui reprocherais cependant d'être un rien faiblarde et de s'estomper assez vite, mais chacun a une sensibilité différente aux piments. Elle mérite donc un demi jambon de platine.

Kephy

 ★★★☆☆ 

Comme d'habitude, je n'ai pas goûté cette sauce dans les mêmes proportions que Giraf, et comme d'habitude, j'ai du mal à la différencier des autres que j'ai pu goûter. J'ai pour ma part trouvé qu'elle mettait un certain temps à enflammer vraiment la bouche, et même si elle est vraiment forte, on arrive tout de même à profiter d'un goût sympathique avant de commencer à souffrir. Je n'en ferais pourtant pas plus mon quatre heures qu'une autre sauce très pimentée, et me contenterai d'un jambon d'argent.

 

 

Ham++

Ham++

 

BONUS !!!

 

 

Comme promis, un petit bonus pour les lecteurs qui attendent avec impatience le test prochain du moruga : une deuxième sauce ! Et oui vous ne rêvez pas, deux pour le prix d'une. Même nous on a du mal à y croire. Cette sauce est la Devil's Delirium, deuxième sauce la plus forte de la gamme de Chilli Factory (environ 400 000 SHU, ou 14/10 en langage australien). Pas de quoi rendre fou un diable de Tasmanie vue comme la Scorpion Strike est bien passée mais tout de même une très bonne entrée en matière pour les néophytes en sauces fortes.

Comme dirait Taz : Abala boula prrtt

Elle est préparée avec du Bhut Jolokia, qui fut longtemps le recordman des piments. Aujourd'hui il reste encore énormément utilisé car il se trouve facilement, est abordable et au dessus du million d'unités (1 001 304 SHU). La sauce est plus simple que la Scorpion Strike : 56% de jolokia, du vinaigre et un peu de tomate. On a donc plus affaire à une purée de piment qu'à une sauce élaborée.

Tapoué !

Elle est très différente de la Scorpion Strike, plus liquide mais avec des morceaux. Son odeur est fine, sans lourdeur, et picote le nez. L'action est aussi différente. Cela commence moyennent, mais monte crescendo. Elle atteint sa pleine force après plus de trente secondes. La brûlure est plus aiguë que sa grande sœur mais dure moins. Le goût est parfumé et ravira ceux qui cherchent une sauce simple à utiliser pour donner un peu de force aux sauces des plats.

 

Verdict :

Giraf

 ★★★½☆ 

Une sauce simple, bonne et efficace à utiliser pour faire la cuisine. Sa force est moyenne comparée à ce que je mange d'habitude, mais elle est quand même entre 80 et 160 plus fort que du tabasco, il en faut pour tout les goûts. 14/10, les australiens sont quand même des petits joueurs. Ce délire qui ne mérite donc qu'un demi jambon d'or.

Kephy

 ★★★☆☆ 

Ne vous méprenez pas, si vous utilisez cette sauce pour relever vos plats, allez-y avec parcimonie sous peine de devoir commander une pizza en guise de remplacement. Pour rester dans la contradiction, je trouve que cette sauce attaque très fort et n'attend pas pour faire parler la poudre. Cependant, même au plus fort de la brûlure, ça reste supportable, on sent la différence de force avec sa grande sœur. Le goût est quant à lui correct, et mérite lui aussi un jambon d'argent.

 

PS : Trouvables chez Australien Wine Store, un des seuls sites européens à vendre les sauces de Chilli Factory, 15€50 la bouteille de 150mL de Scorpion Strike et 14€ le pot de 100g de Devil's Delirium. Il est toutefois possible de les acheter directement sur la boutique de Chilli Factory, mais les frais de ports sont prohibitifs (avion) ou alors le colis est très lent (3 mois par bateau). L'occasion d'acheter en même temps un TShirt "J'ai survécu au piment le plus fort au monde" même si ce n'est plus vrai.

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Pour un article lu, trois offerts :

5 réponses à “Butch au pays des kangourous”

  • Axille:

    Bonjour Giraf, la sauce piquante, t’es tombé dedans quand tu étais petit? Pouvoir apprécier une telle force, c’est puissant !

    • Je ne suis pas tombé dedans étant petit mais plutôt vers 10 ans.
      Je ne sais plus vraiment par quoi j’ai commencé, peut être avec l’huile pimentée pour pizza et la ketchup pimentée.
      Par la suite j’ai découvert les piments oiseaux, j’en mettais des petits morceaux dans presque tout, spaghettis et même moutarde. J’ai fait un petit bout de chemin avec la sriracha aussi.

      Ensuite j’ai passé un moment à manger pimenté presque tous les jours, enfin du Tabasco, mais ce n’était pas très économique vu que j’en usais une bouteille en moins d’une semaine.
      En commençant à travailler, je me suis payé une sauce un peu forte : un Blair’s Megadeath. Depuis je cherche constamment de nouvelles sauces ou piments pour la force mais aussi pour le goût. Mais je consomme aussi des piments plus doux, comme les piments verts frais dans des poêlées de légumes ou encore les petits piments rouges ou verts au vinaigre en pot en verre, qui font de très bon amuse-gueules très peu caloriques.

  • On me dit dans mon oreillette qu’il n’y a pas d’autruche en Australie, mais des émeus.

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